« Pris dans un sens littéral, le terme numérique peut-être défini comme une information qui se présente sous la forme de nombres », déclare Johann Alexis BOUNOUNI, informaticienne, directrice de FUDITEK et BCG, deux entreprises qui évoluent dans le monde du numérique. «Souvent, on abuse de langage pour dire le numérique, parce qu’en informatique tout est représenté par des zéros (0) des un (1),» poursuit-elle

Selon la dirigeante de FIDUTEK, «le périmètre du numérique est extrêmement grand parce qu’il couvre non seulement la partie informatique, technologie, et la programmation mais aussi la télécommunication (radio, télévision, téléphone, ordinateur).» Suivant sa compréhension, le numérique est, en bref, «tout ce qui a rapport avec le codage.»

«On parle du numérique, on voit le monde de la technologie», nous fait savoir Sophie Laube Marcelus, étudiante finissante en Science informatique et membre du laboratoire de la réalité virtuelle de l’ESIH (Tainos Visual Arts). De son coté, Karlex Dominique Boursiquot, étudiant en Science informatique, membre de Tainos Arts visuels,  définit «la technologie comme étant toute choisie ayant un rapport à la technique; qui participe à la facilitation de la vie humaine, tout en simplifiant les tâches quotidiennes, allant de la mécanique à l’électronique. »

«Lorsqu’on me dit numérique, c’est un peu vaste… Le numérique, c’est le présent et c’est également le futur. Tout se fait à présent par le numérique », a indiqué Linsay Benoit, étudiante en troisième année, en Science informatique et en Gestion des entreprises à l’ESIH.

En raison de la montée vertigineuse de l’univers numérique, un problème perdure dans le secteur, celui de la disparité de genres. Les chercheurs réfléchissant sur la question se demande s’il s’agit d’un déficit d’engagement de la part des figures féminines ou d’un sexisme exacerbé existant dans le milieu. Et, la société haïtienne n’est pas exempte de cette réalité où la gente féminine brille par son absence. Du coup, une question ressurgit: s’agit-il d’un manque d’engagement de la part des femmes?

Femme et numérique en Haïti: Quel engagement?

«  Les femmes représentent 52% de la population haïtienne suivant les derniers chiffres avant le séisme du 12 janvier 2010  », selon les propos de la fondatrice de GECA, Johann Alexis. «  Le recensement en Haïti est un véritable casse-tête» at-elle aussi souligné. 

Bien qu’ils représentent plus de la moitié de la population haïtienne, elles sont encore sous-représentées dans le secteur numérique. Pour Max Valentin Lilavois, informaticien, fondateur du laboratoire Tainos Visuel Arts, bien qu’il n’a pas les chiffres exacts, mais il «  ne croit pas qu’il y a beaucoup de femmes évoluant dans ce domaine en Haïti». 

La disparité de genre dans le secteur du numérique est un constat qui se fait à l’échelle planétaire. Haïti n’échappe malheureusement pas à cette situation. «  Les femmes sont un peu timides dans le secteur de la technologie en Haïti », déclare Dominique.

«En Haïti, dans le secteur de la technologie, comparativement aux années antérieures l’évolution des femmes se fait progressivement. Mais sur le plan mondial, nous sommes encore dans la zone rouge. En d’autres termes, pas assez de femmes dans ce secteur », regrette Linsay Benoit, étudiante à l’ESIH.

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«  Lorsque l’on regarde le niveau hiérarchique des femmes dans le numérique, on note que plus il y a de responsabilités, moins les femmes sont représentées: à la Silicon Valley, le fief de la Tech mondiale, seules 13% des femmes accèdent à des postes de gestion dans les entreprises technologiques, et les entrepreneuses ne dépassant pas les 7%  »nous confie la responsabilité de BCG, Madame Bounouni.

Dans quel que soit le domaine, les problèmes sont les mêmes. Dès qu’un champ de savoir prend de l’importance au niveau social, il se masculinise. Dans les années 50, la moitié du secteur informatique était occupée par des femmes.

 «  En Haïti, notre société et notre culture malheureusement ne conçoivent pas encore qu’une femme fonde une famille, travaille et ait du succès professionnellement. Ce monde machiste doit cesser et les chances doivent être égales pour tous les genres de notre société. Sans parler de la rémunération pour les femmes qui est de manière violente très inférieure à celle des hommes », déplore Madame Alexis Bounouni. 

Il faut souligner que dans le cadre de ce travail, on a cherché de trouver des chiffres sur les femmes haïtiennes travaillant dans l’industrie de la Tech en Haïti mais sans succès. Cela complique la compréhension de l’évolution des figures féminines dans le domaine dans le pays. Cet état de fait, reste-t-il sans conséquence sur le secteur?

Absence des femmes dans le numérique: Quelles sont les causes et les conséquences?

«  Ce qui est à la base cet état de fait, c’est parce que le secteur est fortement dominé par les hommes. D’autant plus, le regard que les hommes ont sur les femmes évoluant dans le milieu ne contribuent pas à améliorer cette réalité, »  a relaté l’étudiant finissant, Dominique qui tient pour responsable, les structures traditionnelles des familles haïtiennes.

Selon lui, cette discrimination que confrontent les filles au sein de la société haïtienne qui trouve son origine dans la famille, se perpétue à l’école. Il s’abstient de regarder les institutions ecclésiastiques. Mais à l’entendre, on comprend que le problème empire dans les églises. Il croit que les femmes haïtiennes ne sont pas les seules à être victimes de la masculinisation du secteur. 

«  Les femmes n’ont pas assez de support de leur proche, de leur entourages. Et pour couronner le tout, il y a le manque d’informations. Elles savent très peu au sujet de la technologie »,  indique Linsay. 

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Généralement, en Haïti, on assimile les sciences informatiques aux mathématiques. Ce qui constitue un blocage pour bon nombre de jeunes…

Ainsi, certaines personnes pensent que la privation du monde technologique des femmes a des conséquences sur le développement et l’évolution du secteur en Haïti, tel est le cas de Sophie. Elle pense que priver le monde de la technologie des femmes, c’est le priver de l’idée, de la pensée, de la vision, de l’esprit créatif de presque la moitié de la population haïtienne. Car les femmes représentent environ la moitié de la population haïtienne.

Quelles perspectives pour le numérique en Haïti?

Pour Dominique, « le premier obstacle à surmonter pour susciter l’intérêt chez les filles pour le secteur de la technologie, est le mythe faisant comprendre aux filles qu’il y a des choses qui ne sont pas faites pour elles. »«  La capacité des femmes dans le secteur du numérique est une réalité incontournable. » Suivant les propos de la fondatrice de FIDUTECH.

« L’intégration des femmes haïtiennes dans le secteur du numérique est un grand combat », soutient Max qui encourage les femmes à intégrer le secteur. Car il pense que le secteur n’est pas seulement l’apanage des hommes. 

De son côté, la passionnée des mathématiques, Johann Alexis, pense que  « les femmes doivent s’engager dans tous les domaines, pas seulement dans le numérique ». Quant à Linsay, elle pense qu’elle est une nécessité pour que les femmes s’engagent dans l’univers du numérique. «  Plus de têtes, plus de progrès.  »Lâche-t-elle fièrement. 

Par ailleurs, la jeune fille pense qu’on doit informer les gens en général, les femmes et les jeunes filles en particulier sur la technologie. Leur faire comprendre son importance. Et que le monde d’aujourd’hui est un monde de technologie. Et qu’elle est un outil essentiel qui facilite les activités courantes. Elle pense aussi que le développement de la technologie peut contribuer à une meilleure Haïti tant rêvée par nos compatriotes.

Jacques Jules Abelardo SEIDE 
#BustekMedia 

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