Sur la terrasse de Karibe Hotel, à Juvénat, Pétion-ville, ce lundi 20 juin, un ciel légèrement violet prend place en compagnie d’un vent calme et frais. La nuit commence à s’imposer comme bon lui semble. Des tables de cocktail, installées aux abords d’une petite piscine, abritent des petits groupes de deux, de trois et de quatres personnes discutant dans une atmosphère conviviale. Des serveurs en rouge et noir distribuent sans arrêt un coktail au goût et saveur de Barbancourt.
En tout cas, ce soir, Asú n’est pas ouvert pour faire danser les gens au rythme de la musique et de l’alcool, mais pour le plaisir de parler de business, du progrès des jeunes professionnels et de développement d’entreprise.
Pour la deuxième fois, les influenceurs Marc Alain Boucicault et Carel Pedre présentent une édition spéciale de leur podcast Executive Talk en hybride. Cette fois, la discussion est centrée sur l’épanouissement des cadres d’entreprises, avec un panel composé de quatres dirigeants de grandes compagnies haïtiennes. Il s’agit de Gladys Coupet, directrice générale de la SOGEBANK; Robert Junior Paret, PDG du Groupe ProFin; Allen Bayard, PDG de Access Haiti et Emmanuel Grégory Morissette, directeur des ressources humaines de Barbancourt.
S’il est vrai que derrière le succès de toute entreprise se trouve ses ressources humaines, il est à souligner cependant qu’il faut bien les choisir. Et pour donner des résultats, ces dernières doivent être traitées avec la plus grande délicatesse qui soit.
« En principe, il faut toujours mettre une structure pour repérer les talents. Le leader de l’entreprise ne peut pas les repérer à lui seul », soutient la directrice générale de la SOGEBANK, Gladys Coupet. Allen Bayard croit aussi en la mise en place d’un système pour repérer les talents. Le PDG de Access Haiti estime que c’est par la création d’une structure qu’on arrive à identifier et gérer les ressources humaines.
Bien que Barbancourt cherche surtout à savoir si la personne correspond à la vision et la culture de l’entreprise, cela n’empêche que Grégory Morissette partage l’idée d’une structure pour repérer les talents. Alors que Robert Paret Jr. voit la question de talent d’un autre œil.
« Talent pour moi ce n’est pas une personne. C’est ce que nous avons en chacun de nous. Nous avons chacun un talent », soutient le PDG du Groupe ProFin qui croit que le leader doit être capable d’aider chaque personne à découvrir son talent.
« À chaque fois que je regarde un jeune professionnel, je me pose la question, qu’est-ce que j’aurais aimé qu’on me dise, à un moment pareil, pour faire un pas de plus? Qu’est-ce que j’aurais aimé qu’on me dise pour grandir? », a ajouté M. Paret.
Permettre aux professionnels de s’épanouir dans l’entreprise n’est pas une affaire aisée. D’ailleurs, la gestion des ressources humaines est la tâche la plus difficile pour un leader, selon Mme. Coupet. « Je pense que mon rôle en tant que cheffe d’entreprise c’est de voir comment aider les cadres à grandir, comment les aider à découvrir leur potentiel et donner le meilleur d’eux même », a martelé Gladys Coupet, ferme et confiante.
Pour Mme. Coupet, un jeune professionnel ne laisse pas une institution, mais un manager. « C’est parce que le manager ne lui a pas donné la possibilité de grandir », argumente-elle. Robert Paret Jr. soutient, pour sa part, que « si une personne laisse votre entreprise, c’est peut-être parce qu’on ne construit pas la même chose ».
Si la conversation est énergique, le public est pourtant silencieux et très attentionné. En outre, les gens ne négligent pas les petites pièces distribuées à répétition, accompagnées du cocktail de Barbancourt. Ils écoutent, mangent et boivent. Et pour chaque déclaration inspirante, ils applaudissent à coeur ouvert.
Embarquer les employés dans la vision de l’entreprise, un défi
Pour retenir les jeunes professionnels dans l’entreprise, il faut plus que le salaire. Embarquer les employés dans la vision de l’entreprise est la plus importante. Gregory Morissette explique que Barbancourt adopte une approche « learn startup » au niveau de sa culture d’entreprise, quoique c’est une très ancienne compagnie. C’est en ce sens qu’il offre aux employés un tas d’avantages, comme assurance internationale, bonus de performance, financement aux études, fonds de pensions, etc.
« Malgré la crise de la migration, aucun manager et coordinateur n’a laissé Barbancourt », confie Grégory avec un air de fierté. Le responsable des ressources humaines de Barbancourt ajoute que « ce n’est pas les opportunités qui manquent. C’est justement par rapport à la culture de l’entreprise ».
Par ailleurs, même lorsque Robert Paret du Groupe ProFin développe des stratégies pour s’assurer d’embarquer ses ressources humaines dans la vision de l’entreprise, il croit pourtant que ce n’est pas si grave s’il n’arrive pas à les retenir.
« Mon employé n’est pas ma propriété », lâche-t-il d’un ton ferme. Pour lui, l’employé peut ne pas vouloir s’embarquer dans l’aventure. Et si l’employé le laisse pour créer sa propre entreprise c’est encore mieux. « C’est un succès », dit-il sans hésiter. D’ailleurs, « Il va créer plus d’emplois dans le pays ».
Toutefois, il est à souligner que la fuite de cerveaux est le plus grand défi que rencontrent actuellement les entreprises haïtiennes aujourd’hui, selon Gladys Coupet. La femme qui avait 33 ans quand on l’avait nommée directrice générale de la Citi Bank en Haitit avoue etre affectée grandement par ce phénomène, aujourd’hui, au niveau de la SOGEBANK.
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Avec l’heure qui avance à vitesse de croisière, la fin de l’événement s’impose. Bien que ce ne soit pas ce que veulent apparemment les présentateurs. Dans l’intention de convier certains invités individuellement dans leur podcast, ils ont terminé la conversation avec une séance de question venant du public. Partie que Robert Paret Jr. a bouclé en invitant les gens à reconnaître que les erreurs sont sources d’opportunités et que les leaders d’entreprises doivent donner aux jeunes professionnels la possibilité de faire des erreurs.
« Souvent, vous utilisez les erreurs pour détruire les gens, leur carrière. Aujourd’hui, je veux dire à chaque exécutif ici présent, qu’à chaque fois que vous rencontrez un erreur, ne l’utilisez pas pour détruire mais de préférence, utilisez-le comme une opportunité pour construire », conseil le PDG du Groupe ProFin, après avoir confié que sa carrière a été propulsée après une erreur qu’il a commise en tant que jeune officier de crédit à la Unibank. Alors que cette erreur devrait chambouler sa carrière, son Patron d’alors lui a donné la possibilité de grandir et de ne jamais la répéter.
Lancé en novembre 2020, Executive Talk est un podcast présenté tous les lundis soirs, sur Twitter Space, par Marc Alain Boucicault et Carel Pedre. À travers cet espace, ils reçoivent les exécutifs les plus chevronnés du pays et leur permettent de partager leurs expériences. Cette édition spéciale réalisée en présentiel marque la fin de la deuxième saison.
Shonly Bonel LAGUERRE
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